Des bancs volubiles, des assises en rond renouvelant les fameuses Conversations du XIXe siècle, mais aussi des sculptures chaotiques comme La Chose, façon araignée de Louise Bourgeois, sauf qu’elle vibre au moindre vent du haut de ses poutrelles métalliques… Le Franco-Argentin Pablo Reinoso a pris ses quartiers d’été à Cagnes-sur-mer (Alpes-Maritimes). Jusqu’au 14 octobre, ses créations – des sculptures façon assises ou des objets fonctionnels qui prennent le large, gagnés par une nature rebelle – parsèment le plus grand centre commercial à ciel ouvert de France, Polygone Riviera, ouvert en 2015.
Il n’est pas le seul artiste à s’exhiber dans ce lieu marchand de la Côte d’Azur. Ben, Céleste Boursier-Mougenot, Daniel Buren, César, Antony Gormley, Tim Noble & Sue Webster, Jean-Michel Othoniel, Pascale Marthine Tayou et Wang Du ont déjà semé des créations pérennes sur ce site, traversé par la rivière naturelle Malvan. L’idée de mêler nature, culture et commerce revient au groupe Unibail-Rodamco-Westfield, leader franco-australien de l’immobilier commercial (Les Quatre Temps, Carrousel du Louvre, Carré Sénart, La Part-Dieu…).
Le paradigme du vivant
Le paysagiste Jean Mus, natif de Grasse, a ainsi imaginé un décor végétal luxuriant habillant d’une cascade de plantes jusqu’aux Escalator qui descendent au parking et les promenades de majestueux palmiers. On reste bouche bée devant cet olivier de 500 ans avec, à ses pieds, une plaque de bronze indiquant sa date de naissance, au même titre que les œuvres d’art alentour. Ces dernières ont pris pied dans ce coin de la Côte d’Azur grâce à Jérôme Sans, le cofondateur du Palais de Tokyo, qu’il a dirigé jusqu’en 2006, apôtre des arts hors les murs, en tout cas hors des galeries et des musées, à la rencontre d’un large public. Il a conseillé les différents artistes dont les œuvres sont disposées de façon permanente dans Polygone Riviera. Il est aussi le directeur artistique de cette exposition estivale de Pablo Reinoso, intitulée « Supernature ».
« Polygone Riviera est situé au cœur d’une région qui fut terre d’accueil de Rodin, Renoir, Picasso, Van Gogh, Cézanne, Klein, Miro, Chagall…, souligne Jérôme Sans. Pablo Reinoso qui laisse croître ses œuvres sans limite, comme si le monde végétal reprenait ses droits contre tout ordre établi par l’humain, s’inscrit dans le paradigme du vivant à l’heure où l’écologie est devenue l’une des problématiques centrales de notre société. »
Les précédents étés, ce critique d’art a présenté dans cette région de Provence-Alpes-Côte d’Azur des œuvres de Joan Miro prêtées par la Fondation Maeght, puis celles du plasticien Philippe Ramette et, enfin, l’an dernier, de Lilian Bourgeat spécialisé dans le surdimensionnement d’objets du quotidien – comme ces bottes de géant ou son Banc Public XXL. Cet été, les bancs arabesque de Pablo Reinoso, déjà installés à l’Elysée, devraient attiser la curiosité des millions de visiteurs. « Je propose ici des zones de repos qui invitent à la discussion, au partage et au rêve. Certaines sculptures sont impossibles à utiliser et d’autres se laissent appréhender par le public. C’est cette dualité qui m’intéresse », précise l’artiste qui a récemment animé de ses bancs spaghettis le miroir d’eau, sur la place de la Bourse, à Bordeaux.
« Supernature », Polygone Riviera, 137, avenue des Alpes, 06800 Cagnes-sur-Mer. Jusqu’au 14 octobre.
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